Faire son marché en Birmanie

La Birmanie est considérée comme un pays d’Asie du Sud-Est, bien qu’elle soit marquée par une profonde influence indienne. Les marchés locaux reflètent bien la diversité culturelle et culinaire du pays, un carrefour de civilisations et de saveurs entre sauce de poisson, pâtes de curry, nouilles, pois et lentilles en tous genres.

Habitée par au moins 135 groupes ethniques différents, la Birmanie est un pays multiple. Située entre la Chine et l’Inde, deux pôles d’influence majeure en Asie, elle présente des particularités culinaires uniques, des micro-particularités régionales mais aussi des éléments empruntés à ces deux géants, ainsi qu’à la Thaïlande. En faisant ses courses dans l’une des grandes villes du pays, on voit tout de suite ce mélange des genres réjouissant. À Mandalay par exemple, la dernière capitale royale de la Birmanie, le marché Zegyo donne le tournis. C’est le plus grand et le plus vieux marché du coin, couvrant près de 5 hectares et fondé au XIXe siècle.
Il y a un grand bâtiment étouffant sur plusieurs étages, où l’on trouve des montagnes de tissus colorés, des bijoux, des épices, du thanaka (le bois utilisé dans tout le pays pour faire une pâte dont on s’enduit le visage) et plus encore ; tout autour, des stands servent de la street food au milieu d’une marée de scooters. Salade de papaye verte, de samossas ou de tofu, pâtisseries à base de banane, semoule, riz gluant ou noix de coco, on commence à comprendre ce que mangent les Birmans, mais on n’a encore rien vu. C’est derrière le grand bâtiment que ça se passe. Un dédale de stands et de magasins de fruits, légumes et autres produits frais, séchés ou fermentés est à explorer.

Fruits et légumes à gogo
La Birmanie se situant sous les tropiques et disposant de grandes plaines cultivables, les végétaux sont rois. Côté fruit, c’est la folie habituelle de l’Asie du Sud et du Sud-Est, avec, entre autres, mangues, ramboutans, pastèques, grenades, durians, mangoustans et ananas à gogo, ainsi que pas mal d’agrumes. Côté légumes, même topo. Aubergines et haricots frais en tous genres (le pays a la meilleure gestion du cycle de l’azote au monde grâce à sa culture des légumineuses), tomates vertes ou rouges, choux variés, courges et gourdes, piments forts ou très très forts, concombres, radis, feuilles et herbes fraîches, ainsi qu’un nombre impressionnant de tubercules et rhizomes, il y a de quoi faire.

De quoi faire des salades (thohk), par exemple. On en mange beaucoup ici, mais elles ne ressemblent pas exactement aux salades françaises, pleines de crudités. L’ingrédient de base est souvent cuit ou fermenté ; on y ajoute des herbes fraîches et des condiments, comme du tamarin, de la sauce soja, de l’ail ou des oignons frits, du piment, de la sauce de poisson, des cacahuètes grillées et de l’huile (quand l’huile est jaune vif, c’est qu’elle est aromatisée au curcuma). Parmi les plus populaires, on a les salades de tofu, de thé, de gingembre et différentes recettes aux nouilles.

Le coin qui pue – vive le poisson fermenté
Les légumes se cuisinent aussi en curry, ragoûts ou soupes. À la base de ces dernières, on a généralement un bouillon à la pâte ou à la sauce de poisson fermenté (ngapi) ou à la viande. La viande préférée est de loin le porc, mais tout le monde n’en mange pas ; un peu plus de 4% des Birmans sont musulmans d’après les chiffres officiels (sans doute une estimation à la baisse), et ils sont nombreux à Mandalay. Ils lui préfèrent le bœuf, que les Bouddhistes les plus pratiquants ne consomment pas, comme ça tout le monde devrait être content. Ce n’est malheureusement pas le cas, les conflits religieux faisant rage en Birmanie. Le poulet met quant à lui tout le monde d’accord, comme les fameux ngapi, les pâtes et sauces de poisson fermenté que l’on consomme largement partout, sauf au nord du pays. Facile de les repérer dans un marché : cherchez le coin qui pue, et vous êtes arrivé.

À Mandalay, on trouve également beaucoup de poisson frais, mais uniquement d’eau douce, la mer étant bien loin ; les crevettes d’eau douce, avec leurs longues pinces, sont elles aussi très appréciées. Enfin, le marché regorge d’ingrédients secs en tous genre, avec d’un côté les céréales et légumineuses, abondantes, variées et à la base de tous les repas, et de l’autre les épices, fruits secs et graines. Le pavot côtoie les flocons de piment, le thé vert, la cardamome, les noix et les raisins secs. Par là aussi, pas mal d’œufs de poule, de caille ou de cane, frais, salés ou centenaires. Bref, faire son marché en Birmanie, c’est un voyage dans un voyage. Un périple que nous poursuivrons ensemble, si cela vous dit, avec des recettes typiques

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