Face à la mer

Existe-t-il une ville qui comble à la fois vos sens et permette d’un regard d’embrasser le meilleur des cinématographies gourmandes ? Cette ville se tient face à la mer, le long des côtes basques, et se nomme San Sebastian.

San Sébastian, capitale gastronomique et cinéphile
C’est ici, de part et d’autre de l’Urumera, que s’élèvent deux des quartiers les plus vivants de la gastronomie basque.  Si celle-ci s’est vue renaître à la fin des années 70, emportée par le mouvement de la Nouvelle Cuisine avec à sa tête le duo Arzak/ Subijana, elle trouve aujourd’hui son essor au travers de nombreuses manifestations gastronomiques, dont le Culinary Zinema, qui affichait cette année son septième millésime.
À en croire les différents évènements qui associent nourriture et cinéma (Le Film Food à New-York, le Napa Valley Film Festival ou le Culinary Cinéma à Berlin), ainsi que la sortie régulière de films dédiés dans nos salles (The Lunchbox, Les délices de Tokyo, #Chef ), on peut supposer que les émissions de télés-réalités ont impulsé depuis les années 2000 un nouveau désir chez le spectateur. Ici cependant, la particularité participe d’un lien profond entre la ville et la nourriture. L’appétit des films déborde dans la rue et le cinéphile venu se nourrir de nitrate partira repu, enivré par le txakoli des vinotecas dont s’abreuvent les bars à pinxtos.

Un programme superbe !
Premier soir, cela tombe bien, Juan Maria Arzak, le parrain de la cuisine basque  (comme on l’appelle ici) est présent dans la petite salle du Principe. Il est venu découvrir le film consacré au benjamin de la famille Adria : Constructing Albert. Déformation professionnelle ou mauvaise journée ? Il grogne. Appuyé sur une canne il somme Albert Adria de s’asseoir à ses côtés. Amusé, le second du mythique El Bulli, s’exécute. Nous allons passer plus d’une heure dans ses fourneaux, entre ambition et épreuves, avec en arrière-plan l’ombre d’un grand frère qui attire beaucoup de lumière.
Le lendemain, c’est face à ce même écran que nous découvrons Osamu Tomita. Si ce nom ne vous dit rien, c’eut été l’occasion de découvrir le portrait de cet intégriste du ramen au travers du documentaire Ramen Heads. Ce maître japonais qui, quatre années successives remporta la plus haute distinction consacrée, n’a le weekend venu que comme seule obsession d’emmener femme et enfants déguster les ramens concurrents. Ne lui parlez pas de bœuf bourguignon ou de lapin chasseur : il y ajoutera forcément un bouillon et des nouilles !

Le basque culinary center
Pour le festivalier, c’est également au Basque Culinary Center que pourra se poursuivre le pèlerinage. Centre de formation et de recherche, il est l’institution qui a initié le festival. Il accueille, chaque soir, les repas thématiques qui clôturent les séances. Ce soir-là, à l’issue The Trip to Spain, troisième volet de la comédie gourmande de Mickaël Winterbottom, les chefs Enrique Fleichmann et Jorge Maestro ont revisité les grands classiques de la cuisine espagnole : du poulpe grillé au gin-tonic en sorbet, nous avons pu refaire le voyage du film.

C’est ainsi que tout au long d’une semaine, la possibilité de se détacher du sérieux d’une programmation officielle opère. Et comme l’appelle de ses vœux José Luis Rebordinos, le directeur du festival : «  cette section apporte une ambition différente, celle de pouvoir entrer par toutes les formes de cinémas. Le gastronome découvrira le cinéma, le cinéphile la gastronomie. » (R)amen !

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