Fred Lailler, un gars du cru

Fred Lailler, un gars du cru

Né dans le Muscadet, le vigneron Fred Lailler est devenu, en toute modestie, l’un des porte-drapeaux d’une appellation que le landerneau du vin regarde et goûte, à juste titre, avec de plus en plus d’attention.

Fred Lailler, un gars du cru

« Le brave p’tit jaja juste bon pour accompagner les huîtres »… Voilà comment fut considéré le muscadet durant des lustres. Pendant que des appellations confidentielles souffraient seulement d’indifférence, le vignoble nantais, lui, devait remonter le courant d’une réputation médiocre. A cause en partie d’un négoce pas vraiment porté par un souci qualitatif, il faut dire qu’il avait un peu tendu le bâton pour se faire battre. Mais s’il y a encore du boulot pour convaincre les muscadet-sceptiques, les choses bougent ! Il n’est même plus rare de voir le blanc ligérien à la carte de tables étoilées.

Les raisons de ce « miracle » ? La conviction, la persévérance et l’inspiration de vignerons locaux convaincus du potentiel de leur terroir, qui mettent en bouteilles des vins magnifiques.

Dans le sillage de pionniers comme Jo Landron, Guy Bossard ou la famille Luneau-Papin, une jeune génération suit, incarnée entre autres par Fred Lailler. Pas l’ombre d’un vigneron dans sa famille. On pourrait donc penser le bonhomme venu au métier par hasard, à ceci près qu’il est né à Gorges, village viticole devenu l’un des crus du Muscadet. Pendant dix ans, il a sué pour les autres. En 2011, il a officiellement repris le domaine de Michel Brégeon, figure locale battant en retraite. Son premier geste ? Remettre un peu de vie dans des vignes auparavant menées en conventionnel : « on a commencé à gratter les sols, doucement au départ car les vieilles dames, on y fait attention », explique Fred Lailler pour évoquer ses vignes alors âgées de 65 ans. « Depuis qu’on est en bio, les sols sont plus jolis et sentent meilleur. J’ai l’impression d’avoir des raisins plus équilibrés, avec des maturités phénoliques plus conformes à nos souhaits… Mais c’est aussi ce qu’on a envie de voir », poursuit ce vigneron humble et philosophe.

Son terrain de jeu ? Une dizaine d’hectares plantée de melon de Bourgogne – le cépage star du muscadet – et de folle blanche, enracinée sur deux terroirs différents : le gabbro typique de Gorges, et les sols granitiques de Clisson, le cru voisin. Le premier cisèle des vins droits, en finesse et en tension. Les seconds leur prêtent davantage d’opulence. Pour capturer tout ça en bouteille, Fred bosse d’arrache-pied dans ses parcelles et vendange à la main. Ensuite, il intervient très peu en cave, n’y admet aucun intrant à l’exception d’un peu de sulfites.

Mettre le moins de filtres possible entre le terroir et le vin, voilà l’idée directrice.

Et le terroir est bien là, dans les remarquables cuvées du domaine, quatre muscadets, un gros plant, et des curiosités comme « Blanche », blanc de macération vinifié à partir de raisins de folle blanche, ou cet effervescent doré baptisé « Cavodix » et issu du très rare egiodola. Très conscient des grands sujets qui bouleversent la planète vins, comme le dépérissement de la vigne ou le réchauffement climatique, Fred s’amuse le plus sérieusement du Monde à l’échelle de sa propriété. Un peu à l’étroit dans la vieille cave peu pratique du domaine, il est en train de se construire un nouveau chai. Un pas de plus pour asseoir encore ses nobles ambitions, pourvu que le gel de printemps, subi en 2016, 2017 et 2019, épargne son vignoble plus souvent que ces dernières années : « trois fois en quatre ans, ça fait beaucoup. A ce rythme, ça deviendrait difficile de faire ce métier »… Vu la qualité de ses vins, on espère qu’il puisse le continuer le plus longtemps possible.

Fred Lailler, un gars du cru

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