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Le plastique... plus si fantastique
L'édito de 180°C #18
Le plastique... plus si fantastique
L'édito de 180°C #18En 1990, le groupe de rock français Elmer Food Beat chantait Le plastique, c’est fantastique. Même si les paroles faisaient référence au préservatif, plus personne ne peut se permettre de dire que le plastique est fantastique. Aujourd’hui, la guerre mondiale contre ce matériau est déclarée par une partie de l’humanité. Mollement, quelques États votent des lois pour l’interdire, mais toujours en renvoyant aux calendes grecques leur mise en application. À commencer par la France, qui, à un train de sénateur, a repoussé d’un an l’interdiction de vente d’objets en plastique tels que les pailles ou les touillettes qui ne deviendra effective qu’au 1er janvier 2021 au lieu de 2020 arguant que la fabrication actuelle de ces ustensiles induit des emplois.
Certes, mais la fabrication de pailles et de touillettes grâce à de nouveaux matériaux (roseau, verre, bambou, pâte…) est également créatrice d’emplois. Maintenant, sortez les calculettes. Par ce report totalement abscons, 9 millions de pailles vont continuer à être jetées quotidiennement dans l’Hexagone et ce uniquement dans la restauration rapide. Nous vous laissons calculer le nombre de pailles qui vont se promener dans la nature jusqu’au 1er janvier 2021, tout en sachant qu’il faut plusieurs dizaines d’années avant qu’elles ne se dégradent… sauf à finir dans la cavité nasale d’une tortue ou le ventre d’une baleine.
Depuis 1950, selon un rapport de l’ONU, l’humanité a produit environ 9 milliards de tonnes de plastique. Sur cette quantité abyssale, seuls 9 % ont été recyclées, 12 % incinérées et 79 % jetées ou enfouies dans la nature, océans inclus. Conséquences : 1,5 millions d’animaux tués par le plastique chaque année, un continent de plastique qui flotte dans le Pacifique et dont la taille est évaluée à trois fois la France, une présence record de micro-plastiques dans la banquise, vous et moi qui ingérons des milliers de microparticules chaque année et des chiffres alarmants sur les quantités de plastique à l’horizon 2030.
L’idée n’est pas, ici, de chercher des responsables. Nous le sommes tous, fabricants comme consommateurs, mais chacun doit, à sa manière, tenter de changer le cours des choses en commençant par refuser la paille ou la touillette au café, en privilégiant les achats de produits en vrac, en refusant le sac plastique proposé par votre commerçant qui continue à en distribuer malgré l’interdiction entrée en vigueur en France en 2016 et 2017, en conservant les bocaux en verre pour stocker, en achetant certaines denrées alimentaires à la découpe plutôt qu’en barquettes, en se passant de la vaisselle jetable au profit d’une vaisselle recyclable…
Supprimer totalement le plastique de son quotidien est presque impossible, mais on peut en diminuer la consommation car n’oubliez pas que pendant la lecture de cet édito (environ 1 minute 30) un million de bouteilles plastiques ont été vendues dans le monde. De quoi méditer sur les propos de Jacques Chirac : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs (…). La Terre et l’humanité sont en péril et nous en sommes tous responsables. » Des propos prononcés le 2 septembre 2002, à Johannesburg, à l’assemblée plénière du IVe Sommet de la Terre. Nous sommes en 2019 et nous avons l’impression que rien n’a changé.
Philippe Toinard, rédacteur chef de 180°C.